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Certaines croyances ont la vie dure. Comme par exemple cette idée fumante selon laquelle l'âme a un poids et que le corps s'en trouve allégé de ses 21 grammes lorsque l'on meurt. C'est faut, mais on y croit, ça rend la mort encore plus glauque. Les injonctions sociales aussi, font de la résistance. Comme la joie et le bonheur le temps des fêtes de fin d'année.

21 grammes

Notre rencontre était fatale

Si un jour, on m'interroge sur la dernière fois que j'ai vu cette araignée vivante, je n'aurai aucun alibi, car jamais de nos vies nous ne nous sommes rencontrées. En revanche, je peux assurer malgré un voix chevrotante, que "Mais je vous jure, monsieur le Juge, qu'elle était déjà morte quand je suis entrée dans mes cabinets pour y caguer, m'y croyant seule, comme à mon habitude!".

C'est ainsi que je suis tombée nez-à-nez avec cette jolie araignée, morte de son état lorsque j'ai bien failli lui refaire la frange tant sa vue m'a effrayée quand j'ai poussé la porte de mes petits coins pour faire mon affaire.

Veillée mortuaire

Après l'avoir examinée sous toutes ses coutures et m'être assurée, en lui soufflant dessus, qu'elle était bel et bien morte, celle que j'aurais volontiers baptisée Adèle, je suis restée penchée sur son petit corps sec comme un coup de trique, cependant que la grosse commission tardait à faire sa plus belle sortie.

A mon souffle, la défunte s'est déplacée aussi gracieusement que Jacqueline du Bief en son temps patinait, me laissant déduire que son décès n'était pas récent, bien que l'heure de la mort fut à ce stade indéterminée. Je me suis alors interrogée.

Questions existentielles

Quel poids cette menue arthropode chélicérée pouvait-elle afficher sur la balance avant d'être privée de ses sens? On se demande toujours à combien on estime la vie d'un homme, mais celle d'une titaragne, combien tu lui donnes? Est-ce que ça se paie au kilo ou à la pièce? Est-ce que je vais réussir à démouler un cake parfait ou est-ce que ça va encore accrocher au fond du moule?

Mais surtout, comment cette espèce proportionnellement infiniment plus petite et vide qu'un jour, j'espère, le sera mon côlon, pouvait-elle me poser autant de questions sans me parler, étant donné son état de décès?

A mort les injonctions!

Un rat pelé n'ayant plus de poils, je me suis rappelé que la première question que feue Spiderman m'avait posée malgré elle, c'était celle de son poids, et plus exactement, celui de son âme. Pourquoi? Eh bien tout simplement à cause d'une théorie au cuir aussi dur que le racisme et l'homophobie sont inacceptables mais existent pourtant selon laquelle l'âme pèserait dans le game. Et plus exactement 21 petits grammes.

Pas de quoi faire frémir Bernard Canetti et son régime qui ne font perdre que quelques milliers d'euros à ses pigeons de clients, d'autant plus que scientifiquement parlant, cela ne tient pas.

Pourtant, si l'on élargit son champ de vision sans avoir peur de se coucher moins bête, l'on a parfois besoin de croire en la beauté, la bonté et le poids de l'âme, dans notre société.

Car il en faut, de l'inexplicable, de l'insaisissable et de l'incroyable, pour avaler toutes les couleuvres qu'elle nous impose. A commencer par les traditions par définition indécrottables aux réunions de familles ou de travail pour les grandes occasions à dates bien précises.

Noël, les anniversaires, la nouvelle année, les fêtes nationales ou religieuses, les Secret Santa ou le pot de départ, pourquoi être obligés par un calendrier pour rire et être ensemble?

L'on dit que la période des fêtes de fin d'année est celle qui procure le plus d'angoisses, au point d'en faire une phobie, baptisée la natalophobie. En somme, les fêtes dépriment. Selon le psychologue Julien Besse, les consultations chez le psy augmentent durant cette période.

Noël est probablement la fête la plus sociétale de l'année, au cours de laquelle tout doit être. Bon, parfait, joyeux, chaud et beau, quitte à mettre sous le tapis la charge mentale de l'organisation du repas, du choix de de l'achat des cadeaux, du déroulement du moment jusqu'au démontage des décorations.

La fête exclut toutes celles et ceux qui ne l'aiment pas pour ces raisons-là, les catalogant au rang de dépressifs, de rabat-joie, d'asociaux, voire de sociopathes.

Et si on faisait ce qu'on voulait quand on voulait juste parce que c'est ça qui nous rend heureux? 

Et mon araignée, est-ce qu'elle pesait plus ou moins que son âme?

Tag(s) : #Bref
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